04 Mai
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C’est une première dans la politique béninoise. Un chef de file de l’opposition a été nommé en vertu de la loi. Le secrétaire exécutif national du parti Force Cauris pour un Bénin Émergent (FCBE), Paul Hounkpè a le privilège d’inaugurer la fonction.

En tant que chef de file de l’opposition, le secrétaire exécutif national de la FCBE endosse une fonction singulière jamais exercée de façon formelle par un opposant politique au Bénin. Ni Soglo pendant les 10 ans de Kérékou sous le renouveau démocratique (1996-2006), ni Adrien Houngbédji pendant la présidence de Boni Yayi (2006-2016) n’ont été reconnus par les textes comme chefs de file de l’opposition bien que les faits et leurs positions politiques aient fait d’eux des opposants de taille. C’est ce qui change avec l’avènement de la nouvelle loi sur le statut de l’opposition votée en novembre 2019 dans la foulée des lois issues du dialogue politique d’octobre de la même année.

“En cas d’absence de représentation de l’opposition à l’Assemblée nationale, est désigné chef de file de l’opposition, le chef du parti politique de l’opposition ayant obtenu le plus grand nombre d’élus communaux”, dispose l’article 8 de la loi 2019-45 du 25 novembre 2019. C’est fort de cette disposition que Paul Hounkpè a été reconnu comme chef de file de l’opposition.

Un rôle délicat

Avec des avantages matériels et un rang protocolaire fixés par décret, la fonction que va occuper Paul Hounkpè peut être enviable. Sur le rôle assigné à la première figure de l’opposition, c’est tout sauf la participation à la mise en œuvre de la politique gouvernementale. La fonction de l’opposition, c’est de critiquer l’action de la majorité gouvernante et de préparer l’alternance politique.

Paul Hounkpè et son parti ont toujours clamé s’opposer de façon constructive au pouvoir. C’est bien une des raisons pour lesquelles, leurs compagnons de l’opposition et bien de commentateurs politiques émettent des réserves sur la posture du seul parti d’opposition disposant d’élus. Les critiques les plus sévères accusent même la FCBE d’être une opposition faire-valoir fabriquée par le pouvoir de Talon.

En ce qui concerne l’alternance, c’est en tout cas raté en 2021, Patrice Talon ayant battu sans ménagement ses adversaires, dont Paul Hounkpè colistier d’Alassane Soumanou, dès le premier tour de la présidentielle.

Sachant par ailleurs que “le chef de file de l’opposition peut être sollicité par le chef de l’État pour des missions entrant dans le cadre de la défense des intérêts supérieurs de la Nation” (article 11 de la loi), toute éventuelle collaboration entre le président Talon et l’opposition représentée par la FCBE risque d’être mal vue.

 

D’où vient Paul Hounkpè ?

Le fauteuil de chef de file de l’opposition était clairement destiné à Paul Hounkpè, à voir sa trajectoire ces deux dernières années marquées par des soubresauts dans la vie politique béninoise. Devenu chef du parti FCBE courant septembre 2019 au sortir des législatives sans opposants, Paul Hounkpè a bénéficié de la crise interne au parti pour se hisser comme figure de l’opposition béninoise. Il conduira une délégation de son parti au dialogue politique d’octobre 2019 contre l’avis d’une partie des responsables FCBE. Les élections communales de l’année suivante vont sonner la division définitive du parti, une aile dure ayant refusé d’y participer, décidant en même temps de quitter le parti. Ses meneurs créeront plus tard Les Démocrates…

Affaiblie par ces départs dont celui de son président d’honneur sinon véritable chef, Boni Yayi, et seul parti d’opposition en lice face à quatre de la majorité présidentielle, la FCBE va quand même réussir à obtenir au moins de 10% des suffrages exprimés au plan national et ainsi participer au partage des sièges des conseils communaux avec le Bloc Républicain et l’Union Progressiste. Le parti contrôle désormais 6 mairies sur 77.

Ce sont ses performances aux élections communales qui font de la FCBE, l’opposition officielle et de son premier responsable le chef de file de l’opposition. La nomination par le président de la République de l’ancien maire de Bopa et ancien ministre de la Culture sous Boni Yayi relève plus d’une formalité que d’un choix, la désignation du chef de file de l’opposition étant encadrée par des critères légaux.

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